Citizen Kane d’Orson Welles
L’un des meilleurs films de tous les temps
Prince Guetjens
Critique de Cinéma Haïti Liberté, New York 26 oct. 2011
Ces vingt derniers siècles ont vu l’émergence et la consolidation de différentes formes d’expressions artistiques avec leurs contingences de théories, de discours et d’oppositions. Vers la fin du dix-neuvième siècle, Daguerre et Niepce ont mis en place les premières structures pour la photographie moderne. C’est dans la même foulée qu’est né le Cinéma ; connu sous la dénomination de 7ème art, mais qui au fond, est l’unique médium capable de réunir tous les autres supports de création.
Dès le début du vingtième siècle, malgré les turbulences de toutes sortes, entre autres les deux grandes guerres, que traverse l’Europe particulièrement et ensuite le reste du monde, le Cinéma va quand même connaître des avancées extraordinaires. Et l’un des fleurons les plus représentatifs de cet art de création collectif est à n’en point douter Citizen Kane.
Citizen Kane est un drame américain de 119 minutes en noir et blanc sorti pour la première fois aux USA le 1er mai 1941. En 2002, il est élu par 108 réalisateurs et 144 critiques de par le monde consultés par la revue britanniques Sight and Sound du British Film Institute, comme le meilleur film de tous les temps.
L’histoire retrace le parcours de Charles Foster Kane, qui meurt dans son manoir de Xanadu après avoir prononcé dans un ultime sursaut le mot Rosebud, en laissant ensuite échapper sa boule de noël. Alors qu’il fut encore un enfant, il dût quitter l’attention de sa mère ; héritière d’une mine d’or pour recevoir l’éducation d’un financier, en vue de pouvoir gérer sa fortune future. Devenu un grand patron de presse, le directeur du journal Inquirer épouse la nièce du président des USA et espère ainsi faire une carrière politique, qui s’interrompit au moment où on apprend qu’il trompe sa femme avec une cantatrice de seconde main. Sa femme demande et obtient le divorce et lui, il convole en justes noces avec la chanteuse qui finit par le quitter par la suite. Il finira ses jours dans la solitude.
De la première à la dernière scène du film le narrateur est pratiquement omniprésent, pour veiller aux grains et guider les spectateurs. Dès la pancarte portant l’inscription No Trepassing (Interdiction d’entrer), qui pourtant sera transgressée par la caméra d’Orson Welles en franchisant les grilles de Xanadu pour atteindre la fenêtre de Kane, et par un champ contre champ, contourne cette barrière de verre pour s’inviter dans la vie d’un Kane déjà mourrant. Nous retrouverons ce narrateur dans toute son adresse dans la conclusion le film, au moment où la caméra dessine des arabesques au milieu d’un univers fait d’objets écartés par Kane pour mettre en exergue une luge dont se saisit une personne de la maison pour la livrer aux flammes. A ce moment-là l’œil de la caméra aura le temps de se rapprocher de l’inscription Rosebud gravée sur le jouet que la chaleur des flammes va faire disparaître, au fur et à mesure, qu’il avait prononcé en mourrant.
Orson Welles utilise comme aucun autre réalisateur avant lui le flashback pour raconter l’histoire. Le flashback ; cet outil connu sous le nom d’analepse en langage technique, est un procédé d’inversion qui, dans la continuité narrative fait intervenir une scène s’étant déroulée préalablement à l’action en cours.Toute l’histoire est expliquée dans ce bar où la seconde épouse de Kane tente de noyer son chagrin dans des verres de vin.
Il utilise avec la même dextérité la technique appelée profondeur de champ. Dans la scène qui retrace un moment de l’enfance de Kane, la séquence débute avec des images du gamin en train de jouer dans la neige avec sa luge. Ensuite, un travelling arrière suggère que l’œil qui regarde se situe depuis l’intérieur de la maison. À partir de cet instant, les activités du jeune Kane sont observées en arrière plan, tandis que les adultes discutent de ses lendemains, et les deux plans sont nets et clairs.
Les Plongées - Contre-plongée sont également mises à caution dans la réalisation de ce film qui continue plus de soixante-dix ans après comme l’un des meilleurs films de toute l’histoire du cinéma. Dans des scènes comme ; la demande de mutation de Jedediah Leland (Joseph Cotten) à Kane après la débacle électorale, et celle de la mise en pièces de la chambre après le départ de Suzan (Dorothy Cormingore), la lecture n’aurait pas été aussi concise sans les plongées –contre-plongée comme manière de dire.
La réalisation conduite par Orson Welles bien qu’il s’est taillé le premier masculin (C.F. Kane), est exceptionnelle. Le jeu des acteurs parfait. La photographie, au-delà de toute ambition. La musique faite sur mesure. On dirait que les dieux se sont ligués pour réussir le film du 20ème siècle.
Malgré les ans Citizen Kane a gardé toute sa fraicheur. Il n’existe pas un seul véritable cinéaste à travers le monde qui n’ait pas vu ce classique qui a mis en exergue autant d’innovations cinématographiques. J’ai déjà vu ce film plus d’une dizaine de fois, mais je n’ai pas fini de le voir.
Citizen Kane d’orson Welles est un film à revoir indéfiniment.
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