De l’Urgence de promouvoir la Culture en Haïti
L’un des rares denrées encore exploitables au profit de la Nation
3è partie
Prince Guetjens
Critique d’art Haïti Liberté NY, 30 Nov. 2011
Vèvè Legba |
Dans la conclusion du second moment de ce papier consacré à l’Urgence de promouvoir la Culture en Haïti, j’ai démontré avec force détails que l’un des éléments clefs dont la culture participe à l’élaboration est, sans coup férir, la mentalité, qui à son tour, se charge d’informer les différents paramètres comme ; les habitudes, les coutumes, les idées et les valeurs. J’ai aussi rappelé pourquoi le capital humain premier est la culture.
Ce n’est pas juste la culture au premier degré, mais plutôt ce qui constitue l’essence du vécu d’un peuple, pris en charge par des élites oeuvrant à l’émancipation et la valorisation d’une identité nationale et culturelle forte. Dans le cas bien précis du peuple haïtien, il est prépondérant, compte tenu des circonstances originales de sa fondation, de prendre en compte ce qui fait sa complexité.
Pour cela nous allons devoir interroger la conjoncture géopolitique de la région de la Caraïbe au cours du XVIIIe siècle. C’est sans doute à partir de là que nous pourrions tenter de trouver des éléments de réponses à la question : Comment exister en tant qu’Haïti aujourd’hui, sans pouvoir revendiquer la contribution d’Haïti à la modernité ?
L’histoire de la cruauté de la servitude noire dans la région caraïbéenne et particulièrement dans la portion occidentale de l’île pour justifier la primauté de l’économique, puis la révolte victorieuse des opprimés et leur opiniâtre volonté de constituer une nationalité à leur image dont la défense leur paraissaient impliquer la totale mise à l’écart de l’ancien colon
L’événement à la base, de cette révolution d’esclaves jamais perpétrée avant dans l’histoire de l’humanité, se réalisa le 6 décembre 1492, date tragique qui marqua l’entrée des Haïtiens dans l’histoire. Disons plutôt date impie qui consacra la dépossession des Taynos et annonça simultanément leur le début du premier génocide d’un Etat Européen en Amérique.
Vèvè Grann Brijit |
Pourtant ce nouveau moyen de s’enrichir au détriment de l’autre connaîtra son apogée au tournant du siècle des Lumières quand le type colonie de peuplement institué par l’Espagne, un pays féodal au moment où il a colonisé l’Amérique sera remplacé par la colonie de plantations par la France et l’Angleterre qui disposaient de moyens et de technologies adéquats pour faire venir dans la région de nouveaux moyens de production.
Dans son ouvrage sur l’Histoire de l’art de la Caraïbe le docteur Yolanda Wood pose le principe de la nécessité de regarder l’histoire de la région à travers notre propre lentille idéologique, pour éviter de participer à la consolidation de la volonté de l’ancien esclavagiste de garder son hégémonie sur les peuples de cette partie du monde. Cette démarche entreprise plusieurs décennies plus tôt par des intellectuels comme Alejo Carpentier, Jacques Stephen Alexis, Thomas Guillén, pour construire une base de connaissances à partir de la région est consolidée sur le plan artistique et historique par le travail de ce chercheur émérite.
La force de travail gratuite (les hommes et les femmes ramassés sur les côtes d’Afrique de l’Ouest) versée par les nouveaux maîtres dans la région pour rendre opérant le passage du système de peuplement au système de Plantation vont créer une polarisation qui influence aujourd’hui encore les anciennes colonies, en particulier Haïti.
L’équation, : Blanc = maître = riche = civilisé = chrétien = européen opposée à Noir = esclave = pauvre = sauvage = vodouïsan = africain, née de l’exploitation de l’époque influence aujourd’hui encore le vécu au sein de la société haïtienne. C’est si vrai que dans la mentalité des gens, il paraît un parfois douteux que des petits-fils de nouveaux libres puissent disposer de certaines richesses. Ce qui n’est pas le cas pour les descendants des anciens libres en Haïti.
J’ai sans doute erré un peu à travers ces différents couloirs de l’histoire, en essayant d’identifier l’obstacle qui nous empêche d’accéder à ce sursaut de fierté et d’auto appréciation indispensable à la mise en exergue de nos valeurs. Mais, il m’a semblé que ce détour n’était pas de trop pour mieux avancer vers l’objectif défini au début, dans les premières lignes de cet article aux ambitions démesurées.
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